vendredi 12 septembre 2014

L’immortalité de Denise Bernhardt

« Les dieux eux-mêmes meurent/mais les plus beaux vers demeurent plus fort que les airains», dit Théophile de Viau. En effet, comment pourriez-vous croire, qu’une poésie peut-être mortelle ? Mais non bon sang ! Ce serait donc de l’amnésie, subversion folle, véritable abnégation, divagation sous le bas-ventre du temps ; la vie serait bien morte également. L’écriture, c’est donc de la pure matière éternelle, porteuse de vie, en mouvance sempiternelle au gré de l’espace-temps. Si Homère, Baudelaire, Rimbaud, ont pu immortaliser leurs noms de poètes, Denise Bernhardt en fait aussi partie intégrante, de ces poètes habitant l’immortelle mémoire de l’écriture, et par le souffle de son œuvre, elle a su donc appeler l’immortalité.

Mais jusqu’ici, on louvoie donc encore dans le rêve, on rêvasse toujours, et il fallait se tremper les pieds dans les fleuves du langage, se mouiller les pieds le corps l’âme, s’incorporer, dans la troublante réalité éblouissante de l’écrivain.


Alors ce matin-là, j’ai pu recevoir quatre florilèges de Denise Bernhardt, dont L’Ame Nue en fait partie. A la six-quatre-deux, je me suis glissé dans ce paysage de rêves…, ce territoire poétique si merveilleux. En fait, en lisant à peine ces textes, on sent déjà une certaine douceur de dire, l’on y voit bien la silhouette d’une main berceuse de femme nous parlant, nous susurrant si tendre, avec des gestes hyper affectifs. L’auteure n’a pas donc à justifier qu’elle est une femme, car elle l’est bien déjà dans ses mots les plus sensuels, ses maintes manières de dire, ses fresques, ses décors si féminins, si suaves, donc pas la peine de parcourir cent milles lieues, pour en décrypter, ou pour scruter son identité. Elle est bien femme, non par son aspect physique, mais par ses innombrables reflexes, ses myriades de façons de penser…, ses soliloques envoûtants, son état d’âme ou son subconscient :


« Je t’avais offert mes lèvres

En fermant les yeux
Pour que tu viennes en orfèvre
Me divertir un peu.

Mais je n’eus pas
Ta bouche douce
Comme un pétale
Sur ma bouche.

Alors je mis ma tête
Dans ton cou,
Et dans la rivière de mes cheveux,
Je te noyais de baisers ».

Et si la métaphore, se veut bien leitmotiv du dit, elle est alors ici exploitée à merveille, tissée dans la bonne toile. La poétesse a la voracité de cracher ses bouillonnements intérieurs, son bien-être, son mal-être, nous transcrit les plus douces paroles métaphoriques, toutes empreintes d’une féerie majestueuse, d’une tendreté particulière ; et le verbe en est bien souple, très ample, et assez tranchant quelquefois. Cette parole pèlerine, voyage entre sphères et ombres, entre amours et thébaïdes, « de crêtes en abîmes », « de sécheresses en plénitudes ». Dualités assez surprenantes, dispersées de part et d’autre dans le corps du texte. L’auteure en attente…, attend bien souvent un sédatif à son corps pleurant. Prestidigitatrice parfois, elle traverse son univers chimérique, elle sait « les aubes incertaines », « le temps blessé », « instants délicieux » et furtifs instants. Elle sait l’hiver, elle sait l’aurore… L’individu qui a tant marché, tant vécu, ne peut en mourir si facilement, l’expérience grossit ses sens.

Merci de m’avoir accompagné le long de ce beau pèlerinage, et croyez-en, l’œuvre de Denise Bernhardt ne mourra pas, elle en vivra. Je vous laisse donc enfin avec ce texte de l’auteure :

                                     
Il est des feux

Qui ne meurent pas
Et qu’un souffle suffit
A faire renaitre.

Il est des liens
Qui ne se brisent pas
Quelque soit l’épée
Et l’orient de la lame.

Il est des mots
Qui ne s’effacent pas,
Venus des antres
De chair et de sang.

Parce qu’ils sont
Nés de mon cœur embrasé,
Tissés de mes mains candides,
Gravés dans le cristal de l’âme.


© Raynaldo Pierre Louis
Poète-Ecrivain
République Dominicaine

Décembre 2013

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NOTICE :

Denise Bernhardt, née en France en 1942, à Cannes , elle passe son enfance au bord du lac d’Annecy, son père étant savoyard, en partage avec la Côte d’Azur. En 1961 elle devient enseignante, puis agent administratif . Elle écrit ses premiers poèmes dès l’école primaire mais ce n’est qu’en 1997 qu’elle commence à publier .
La plupart de ses douze recueils édités ont obtenu des prix. En particulier,
Le Prix Aragon de la Société des Poètes Français en 2000
pour Dialogue Ensoleillé, écrit avec René Eyrier,
Le Prix de la Fondation Blanchard pour LACRIME en 2002.le Couronnement de Mérite IL CONVIVIO à Rome en 2003 pour l’AME NUE
En 2006, publication de « La Vie en Marelle « avec Duccha, jeune poète d’ Haïti, et l’Amour du Monde en 2010 avec Duccha toujours : Duckens Charitable.
Prix pensieri in versi (Il Convivio )
En 2007 publication de « La Mangrove du Désir «
2eme Prix des Amourimes 2009 et Grand Prix des Erotides 2008
pour le recueil Le Temps des Sortilèges et les Braises Noires
décernés par POESIAS (Cercle Européen de Poésie Francophone.)

La Face Double du REVE publié en 2010 avec Yves Romel Toussaint.au Vert Galant Editeur.et en 2011 Tremblements de Cœur.
Le Temps des Sortilèges publié en 2013 – Edition des Vagues (HAITI)
L’auteur est membre de la Société des Gens de Lettres ,
Sociétaire de la Société des Poètes Français, Déléguée pour Haïti
Membre du Pen Club International et de nombreuses autres associations littéraires dont la Société des Poètes Créolophones en HAITI. Et du Comité de lecture des Editions Des Vagues.(HAITI) .Elle intervient dans de nombreuses revues et quotidiens, ainsi que sur des sites internet, en France et à l’étranger.

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